Immunité de Donald Trump : la Cour suprême a statué
La décision du 1er juillet de la Cour Suprême sur l'immunité de Donald Trump contre les poursuites judiciaires offre une structure complexe pour la gestion judiciaire des diverses poursuites contre lui. Cette décision ralentira considérablement les poursuites en cours, et il est difficile de prévoir si les procureurs réussiront à le traduire en justice et à imposer une sanction pénale. Entre-temps, la prolongation de ces poursuites continue de polariser les États-Unis en cette année électorale importante.
Par Frederick T. Davis, ancien procureur fédéral et membre des barreaux de New York et de Paris
La Cour a-t-elle statué que Trump bénéficie d’une immunité contre les poursuites pénales ?
Non, la Cour n’a pas déclaré que Trump est catégoriquement à l’abri des poursuites et aucune des poursuites en cours n’a été rejetée. Cependant, la Cour a fourni une analyse des poursuites présidentielles que les divers tribunaux devront appliquer à ces poursuites et à toute future poursuite. Cette analyse est complexe et, dans certains cas, dépendra d’une analyse nuancée de la manière dont les actes spécifiques de Trump sont caractérisés. Essentiellement, la Cour a déclaré que Trump est « absolument immunisé » pour tout acte relevant du « cœur » de ses pouvoirs constitutionnels, mais qu’il n’est pas à l’abri des poursuites pour des actes purement privés. La Cour a également indiqué qu’il existe nécessairement une « zone grise » où la responsabilité pénale de Trump pour ses actes pourrait dépendre de leur caractérisation. La Cour a suggéré que certains de ces actes pourraient être « présomptivement » immunisés contre les poursuites, laissant ainsi une large marge de manœuvre aux procureurs et à Trump pour débattre de comment appliquer le nouveau principe dans chaque cas particulier.
Quelles seront les prochaines étapes ?
Cette décision concerne l’une des deux poursuites fédérales contre Trump, relative à sa responsabilité dans les efforts pour renverser les résultats de l’élection de novembre 2020. Le juge du procès devra désormais organiser une série d’audiences pour déterminer lesquels des faits allégués contre Trump peuvent être qualifiés de « privés » et donc susceptibles de poursuite. La poursuite en cours dans l’État de Géorgie, qui traite également des efforts pour renverser le vote de 2020 mais se limite à cet État, devra suivre un parcours similaire.
Les deux autres poursuites peuvent être quelque peu différentes car elles se concentrent principalement sur les actes de Trump lorsqu’il n’était pas président. La poursuite devant le tribunal de l’État de New York, dans laquelle Trump a été reconnu coupable, est basée sur ses efforts pour cacher le paiement de « hush money » à une actrice pornographique, en grande partie avant qu’il ne prête serment en tant que président; la poursuite fédérale en Floride se concentre sur sa rétention de documents confidentiels d’État après son départ de la présidence et ses efforts pour entraver la justice. Le fait que ces affaires se concentrent sur ses actes en dehors de sa présidence suggère que les procureurs auront plus de latitude pour soutenir qu’il s’agissait d’actes « privés ». Le juge de l’affaire de l’État de New York a toutefois reconnu que Trump devrait avoir la possibilité de discuter de l’effet de la nouvelle décision sur sa condamnation et a reporté l’imposition de la peine – initialement prévue pour le 11 juillet – à septembre. Les autres juges n’ont pas encore établi de calendrier définitif, mais l’importance d’une révision judiciaire stricte des accusations des procureurs rend essentiellement impossible que l’un des procès restants ait lieu avant le jour de l’élection, le 5 novembre.
Quelle a été la réaction à la décision et a-t-elle contribué à la polarisation des débats politiques et constitutionnels ?
La juge Sotomayor a rédigé une dissidence très forte, rejointe par deux autres juges, dans laquelle elle soutient que la décision de la majorité ne repose ni sur le texte de la Constitution ni sur un cadre historique, mais qu’il s’agit d’une décision purement « politique ». Elle soutient également que la décision pourrait avoir des conséquences dévastatrices. Dans un passage souvent cité, elle note que, selon le raisonnement de la majorité, si Trump ordonnait à une unité militaire d’assassiner son opposant politique, il pourrait invoquer l’immunité puisque l’acte relèverait de ses pouvoirs constitutionnellement énumérés en tant que « commandant en chef ».
Les commentaires publics sur la décision ont suivi des lignes extrêmement partisanes : toutes les grandes figures du parti républicain l’ont soutenue, tandis que le président Biden et la plupart des autres démocrates ont déclaré que la décision « sape l’État de droit ». Quelques mois avant une élection très disputée et hautement conséquente, la décision n’a fait qu’accentuer la division partisane déjà marquée de la société américaine, et prolongé l’angoisse.