Par Didier Martin, avocat associé du cabinet Bredin Prat et Myriam Epelbaum avocate associée du cabinet Bredin Prat.

Quel impact de la proposition de directive Omnibus sur le champ d’application et le calendrier des directives CSRD et sur le devoir de vigilance ?

S’agissant de la directive CSRD, la proposition vise à réduire significativement le périmètre des sociétés concernées. Pour les entreprises européennes, seules les grandes entreprises ou groupes de plus de 1000 salariés seraient soumises à l’obligation de publier les informations de durabilité. Ainsi, au total, 80% de sociétés sortiraient du champ de la directive CSRD. L’entrée en vigueur, variable selon la taille et catégorie d’entité concernée, est par ailleurs globalement décalée de deux ans.

Le champ d’application de la directive CSDDD demeurerait inchangé, mais il est proposé que la clause de revoyure pour l’inclusion des services financiers soit supprimée. La date butoir de transposition serait décalée d’un an (juillet 2027) de même que son entrée en application pour les plus grandes entités (juillet 2028), avec un impact par ricochet sur l’amélioration prévue du reporting des institutions financières au titre de leur propre règlementation. Parallèlement l’adoption par la Commission de guidelines d’application serait avancée à juillet 2026.

Quels changements la proposition de directive Omnibus apporte-t-elle sur le contenu des informations de durabilité prévues par la directive CSRD ?

Il est prévu que la Commission simplifie et clarifie, par un acte délégué, les standards de reporting actuels (ESRS), sur la base du concept de double matérialité (impact sur l’entreprise et sur les tiers), qui resterait inchangé, mais dont l’application pratique serait renforcée pour s’assurer que seules les informations matérielles soient publiées. Des standards volontaires de reporting, basés sur ceux applicables aux PME, seraient adoptés pour les entités n’entrant pas dans le champ de la directive CSRD.

Les entités soumises au reporting obligatoire ne pourraient pas demander davantage d’informations que celles contenues dans ces standards pour remplir leurs propres obligations de reporting et seraient donc exemptées de reporting sur les acteurs de leur chaîne (sous-traitants, par exemple) ayant moins de 1 000 salariés. La proposition envisage l’abandon des normes sectorielles qui étaient prévues par la directive CSRD, ainsi que de l’évolution de l’assurance limitée vers une certification des informations de durabilité à un niveau d’assurance raisonnable, ce qui aurait conduit à un contrôle plus strict.

Comment la proposition de directive Omnibus impacte-t-elle les obligations de devoir de vigilance des entreprises ?

La proposition Omnibus vise à alléger substantiellement les obligations relatives au devoir de vigilance prévues par la directive adoptée en juin 2024. Cela résulte notamment de la proposition d’atténuer les obligations d’identification des incidences négatives tant au niveau des partenaires commerciaux directs, lorsqu’ils sont de plus petite taille, qu’indirects ces derniers sortant du champ de l’obligation de contrôle sauf connaissance de violation des droits protégés, avec un alignement sur l’approche retenue par le législateur allemand. Ce texte propose en outre de réduire la fréquence de réévaluation du plan à tous les 5 ans. La proposition Omnibus prévoit également d’assouplir les obligations de consultation des parties prenantes pour l’établissement du plan de vigilance, dont la définition est substantiellement réduite. Les mesures correctives seraient plus limitées, avec en particulier la suppression de l’obligation de mettre fin à une relation commerciale, les sanctions pécuniaires amendées et le régime de responsabilité civile harmonisé seraient supprimés, avec renvoi aux droits nationaux et la disparition des dispositions spécifiques au droit d’être représenté pour agir judiciairement. L’obligation relative au plan de transition climatique compatible avec les objectifs de l’accord de Paris serait alignée avec les dispositions de la directive CSRD.

Le processus législatif européen venant d’être entamé, le texte doit désormais faire l’objet de discussions au Conseil européen et au Parlement européen. La Commission a invité les co-législateurs à traiter cette proposition Omnibus comme une priorité, plus particulièrement les dispositions visant à reporter l’entrée en vigueur des obligations de disclosure et la date butoir de transposition de la directive sur le devoir de vigilance.