L’autre nomination attendue au Conseil constitutionnel : le « dixième membre »
Si la nomination de trois nouveaux membres au Conseil constitutionnel est essentielle pour l'institution, personne n'a évoqué cette autre nomination à venir, non moins importante : celle de son Secrétaire général.

Par Philippe Blachèr, Professeur de droit public à l’Université Lyon 3
Quelles sont les attributions du Secrétaire général du Conseil constitutionnel ?
Figure peu connue du grand public, le Secrétaire général du Conseil constitutionnel se présente comme un « super soliste » à côté du chef d’orchestre qu’est le Président. Le Secrétaire général dirige les services administratifs, en particulier le service juridique, une structure peu étoffée mais composée d’excellents techniciens du droit, chargés d’assister les neuf membres dans la préparation des décisions. Il veille ainsi à mettre en musique la rédaction des jugements rendus en supervisant toutes étapes d’un recours : de la saisine jusqu’à la publication du communiqué de presse de la décision. Il dialogue avec le Secrétariat général du Gouvernement, les assemblées parlementaires, les ministères et parfois les médias (comme lors de l’épisode de la réforme des retraites au printemps 2024). Il supervise la communication sur les décisions rendues, en particulier les « communiqués de presse » publiés sur le site internet officiel du Conseil. Par ailleurs, il entretient avec les universitaires des relations permanentes, il dirige la revue « Titre VII » publiée sous le patronage du Conseil au sein de laquelle des professeurs de droit ou des doctorants publient des commentaires et des chroniques constitutionnelles. Bien que les textes ne le prévoient pas (sauf en matière de contentieux électoral), il est présent lors des délibérations et peut, selon le tempérament des personnalités qui composent l’institution, exercer une influence notable sur l’orientation de la jurisprudence par la rédaction de notes distribuées aux neuf membres du collège. De l’avis unanime des observateurs, son rôle est considéré comme essentiel. La doctrine constitutionnaliste évoque parfois le « dixième membre » du Conseil constitutionnel tant son influence peut s’avérer décisive au sein de la Haute instance.
Quel est le profil attendu pour le futur Secrétaire général du Conseil constitutionnel ?
Parce que le rôle premier d’un Secrétaire général consiste à « sécuriser » une décision en veillant aux aspects légistiques qui touchent tant la rédaction que la portée du jugement, la fonction est, de fait, réservée à des juristes de formation, ayant une expérience juridictionnelle avérée. Les derniers titulaires étaient tous issus du Conseil d’Etat : Bruno Genevois (1986-1993), Olivier Schrameck (1993-1997), Jean-Eric Schoettl (1997-2007), Marc Guillaume (2007-2015), Laurent Vallée (2015-2017) et Jean Maïa (depuis 2017). Par le passé, un magistrat de l’ordre judiciaire a occupé la fonction (Bernard Poullain, 1983-1986). A ce jour, aucune femme n’a été nommée à ce poste. Ainsi à côté des neufs membres du collège, il y a bien des juristes – de profession – qui travaillent au Conseil constitutionnel et qui les assistent.
Qui nomme le Secrétaire général du Conseil constitutionnel ?
L’actuel Secrétaire général est sur le départ. Son successeur sera connu par décret du Président de la République rendu sur proposition du Président du Conseil constitutionnel (décret n°1293 du 13 novembre 1959). Le décret de nomination de Richard Ferrand, publié le 21 février, permet de lancer le processus de sélection du Secrétaire général. Futur interlocuteur direct et privilégié du Président du Conseil, le Secrétaire général sera, sans aucun doute, l’un des personnages clés pour l’avenir de l’institution. Il imprimera, en interne, un style et une dynamique. Quel que soit le profil de la personnalité choisie, une chose est certaine : ce sera un(e) juriste !