La fermeture judiciaire du site COCO.GG : un exemple qui fera date
Une opération internationale d’envergure a abouti le 25 juin 2024 à la fermeture du site de tchat Coco.gg qui était une véritable plaque tournante de pratiques illicites, allant de la pédopornographie jusqu’aux meurtres et autres guet-apens homophobes.
Par Myriam Quéméner, magistrat honoraire, docteur en droit
Pourquoi fermer le site Coco.GG?
Le site de discussion Coco.gg, créé en 2003, était un véritable repaire pour les pédophiles et les prédateurs sexuels sur internet. Il est en effet connu depuis de nombreuses années comme étant un facilitateur de commission de diverses infractions, notamment des actes de pédocriminalité, de proxénétisme, de prostitution, de viols, de vente de stupéfiants, de guet-apens, voire d’homicides. Par exemple, un mineur qui dit avoir 14 ans reçoit en quelques instants sur coco.gg des sollicitations pour des rencontres, des échanges de photos ou de vidéos d’ordre sexuel. Suite à de nombreuses plaintes dénonçant au total plus de 23 000 faits sur le site Ccoc.GG au préjudice de 480 victimes entre le 1er janvier 2021 et le 7 mai 2024, une enquête internationale a abouti. En conséquence, la direction générale des douanes et droits indirects et la gendarmerie nationale ont procédé à la fermeture du site Coco.GG le 25 juin 2024 à la demande de la juridiction nationale en charge de la lutte contre la criminalité organisée (Junalco) du parquet de Paris
Quelles sont les infractions qui ont été retenues ?
La section financière et cyber de la Juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée (JUNALCO) du parquet de Paris a retenu une nouvelle infraction issue de la loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (LOMPI) en ouvrant une information judiciaire, notamment sur l’infraction de fourniture d’une plateforme en ligne pour permettre une transaction illicite en bande organisée, punie de 10 ans d’emprisonnement et 500.000 euros d’amende. Elle a aussi retenu d’autres infractions relatives à la pédocriminalité, au proxénétisme aggravé, au blanchiment aggravé et à l’association de malfaiteurs.
Quelle sont les suites de cette affaire ?
Le créateur de la plateforme, Isaac Steidel, a été interpellé en Bulgarie ainsi que trois de ses proches en France ; ils sont soupçonnés d’avoir assez largement contribué à l’administration de la plateforme. Deux serveurs du site Coco.gg, désormais fermé, étaient situés en Allemagne, et son nom de domaine a été saisi. La mise hors ligne de Coco.gg suscite l’intérêt des acteurs malveillants et l’on constate une multiplication des copies de la plateforme dont certaines reproduisent le site fermé. Le phénomène semble, pour l’heure, contrôlé, les sites concernés étant bloqués plutôt rapidement. Il faut néanmoins redoubler de vigilance, car il est possible que des tentatives similaires de simulacres continuent d’émerger sur la Toile.
La fermeture du site a été possible grâce à une coopération de plusieurs pays européens. Des serveurs ont été saisis en Allemagne et une phase opérationnelle s’est déroulée en Bulgarie. Les Pays-Bas, la Hongrie la Lituanie ont également participé à l’enquête. Le renforcement de ces stratégies coordonnées au plan international est désormais indispensable et doivent se poursuivre pour lutter efficacement centre ces fléaux attentatoires à la dignité humaine.