Par La rédaction.

Qu’est-ce que la grâce présidentielle ?

Descendante des lettres de cachet de l’Ancien Régime, la grâce est une prérogative du Président de la République fixée par l’article 17 de la Constitution. « Le Président de la République a le droit de faire grâce à titre individuel », dispose sobrement le texte. La grâce s’adresse évidemment aux personnes condamnées sur le plan pénal qui doivent en faire la demande elles-mêmes ou par la voix d’un tiers (avocat, proche, procureur, association).

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Problème : la condamnation de Nicolas Sarkozy n’est pas définitive

« Il n’est pas dans cette mentalité-là », a indiqué Jean-Michel Darrois, l’un des avocats de l’ancien chef de l’Etat. Quand bien même le serait-il, difficile de penser qu’une grâce puisse lui être accordée. D’abord, parce que la condamnation qui l’a frappé, jeudi 25 septembre, n’est pas définitive. « Aucun texte ne prévoit de condition de condamnation définitive pour l’octroi d’une grâce, précise Anne Ponseille, maître de conférences en droit privé à la faculté de droit et de Science politique de Montpellier. Mais la doctrine majoritaire s’accorde pour dire qu’il s’agit d’une condition de recevabilité. »

Le Code pénal ne consacre, en effet, que deux courtes dispositions à ce sujet. L’article 133-8 qui précise que la grâce « ne fait pas obstacle au droit pour la victime d’obtenir réparation du préjudice causé par l’infraction ». Et surtout, son prédécesseur, l’article 133-7, qui dispose que « la grâce emporte seulement dispense d’exécuter la peine ».

Et c’est là que le bât blesse dans le cas d’espèce. Si Nicolas Sarkozy était gracié aujourd’hui, sa peine serait, certes, suspendue mais pas la procédure désormais en cours devant la cour d’appel. Autrement dit, il serait tout de même convoqué par un nouveau procès avec un risque de nouvelle condamnation, de nouvelle peine et donc, la nécessité de faire une nouvelle demande de grâce. « On ne peut pas aller contre une décision de justice tant qu’elle n’a pas produit tous ses effets de droits », rappelle à ce propos la constitutionnaliste Anne-Charlène Bezzina qui pointe aussi le risque « d’atteinte à la séparation des pouvoirs » en un pareil cas.

Emmanuel Macron n’y a eu recours qu’à une seule reprise depuis 2017

Le président de la République, Emmanuel Macron, est le garant des institutions et de la séparation des pouvoirs. Depuis son accession à l’Elysée en 2017, il n’a eu recours au droit de grâce qu’à une seule reprise. En 2018, il était venu au secours d’une détenue de 73 ans, condamnée à la perpétuité pour avoir tué un de ses anciens clients quand elle était prostituée. Après trente ans de détention, celle-ci avait bénéficié d’un « geste d’humanité », selon les propres termes de l’Elysée.

Ceux qui ont occupé son poste auparavant y avait plus souvent recours. Selon les statistiques communiquées par le ministère de la Justice, François Hollande avait prononcé neuf grâces entre 2012 et 2017, dont celle en faveur de Jacqueline Sauvage, condamnée après avoir tué son mari violent de trois coups de fusil dans le dos. C’est encore plus pour Nicolas Sarkozy qui y avait eu recours à 49 reprises, dont une fois au bénéfice de l’ancien préfet du Var Jean-Charles Marchiani condamné pour « trafic d’influence par personne dépositaire de l’autorité publique ». Ce qui n’avait pas manqué, à l’époque, de susciter la polémique.