En dehors du référendum et de la dissolution, comment Emmanuel Macron peut-il « redonner la parole aux Français » ?
Lors de ses vœux du 31 décembre, le Président de la République a annoncé qu’il demanderait aux Français « de trancher certains […] sujets déterminants » liés à « notre économie, notre démocratie, notre sécurité, nos enfants ». Si le recours au référendum semble être l’option privilégiée, tandis qu’une nouvelle dissolution ne sera possible qu’à compter de l’été 2025, il n’est pas exclu qu’Emmanuel Macron envisage de recourir à d’autres dispositifs pour donner corps à son engagement.
Par Bertrand-Léo Combrade, Professeur à l’Université de Poitiers
Quels outils pourraient être mobilisés par le Président de la République ?
Depuis 2017 et sa réélection en 2022, Emmanuel Macron est un adepte des innovations institutionnelles motivées par une volonté d’opérer une forme de « régénération démocratique ». Que l’on pense, par exemple, au « Grand débat national » organisé en réponse au mouvement des « Gilets jaunes », aux conventions citoyennes pour le climat et la fin de vie réunissant des citoyens désignés par le sort, ou encore au Conseil national de la refondation (CNR) destiné à « créer une nouvelle manière de concerter et d’agir ».
Durant l’année 2025, Emmanuel Macron pourrait être tenté de poursuivre ces différentes expérimentations, et pourquoi pas d’en imaginer de nouvelles, en marge des textes puisque le Président de la République ne dispose d’aucune compétence constitutionnelle en la matière.
À quoi servent ces outils ?
Au-delà de leur diversité, ils entendent contribuer à la lutte contre un sentiment de dépossession démocratique. Dans ce sens, il est vrai qu’un récent sondage relève par exemple que 24 % des Français souhaiteraient une meilleure écoute de leurs préoccupations. Sans doute le recours à ces différents outils, permettant de mobiliser directement les citoyens sans passer par l’entremise de leurs représentants à l’Assemblée nationale et au Sénat, donnerait plus de vigueur à l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen qui proclame la faculté pour les citoyens de concourir à la formation de la loi, non pas seulement par le biais de leurs représentants mais aussi « personnellement ».
Quelle est leur efficacité ?
Il n’aura sans doute pas échappé à la sagacité du lecteur que ces initiatives n’ont pas, à ce jour, bouleversé les conditions de participation du citoyen sous la Ve République. Les propositions de la convention pour le climat, qui devaient être soumises « sans filtre » au Parlement ou à référendum, n’ont pas toutes fait l’objet d’une concrétisation juridique. Celles de la convention pour la fin de vie ont été provisoirement réduites à néant en raison de la dissolution de l’Assemblée nationale le 9 juin 2024. Quant à la « révolution copernicienne » promise par l’institutionnalisation du CNR, elle révèle plus un attachement à la « méthode Coué » qu’à la réalité. Derrière ce happening permanent se cachent en réalité de simples mécanismes de démocratie consultative qui demeurent, par essence, dépourvus de tout caractère contraignant à l’égard des pouvoirs publics. L’hypothèse d’une poursuite de leur usage ne signifie donc pas que nous sommes à l’aube de bouleversements démocratiques majeurs.