Panne à Paris-Orly : quelles conséquences pour les transporteurs aériens et leurs passagers ?
Le 18 mai dernier, une panne de radar de la tour de Paris-Orly a conduit la Direction générale de l’Aviation civile (DGAC) à demander aux compagnies aériennes de réduire de 40 % leurs vols pour le reste de la journée. Le lendemain, c’est une réduction de 15 % qui a été demandée à ces mêmes compagnies. Quelles sont les conséquences des annulations de vol subséquentes pour les transporteurs aériens et leurs passagers ?
Par Jeremy Heymann, Professeur à l’Université Jean Moulin Lyon 3
Quelles solutions pour les passagers ayant vu leur vol annulé ?
La régulation du trafic aérien de l’aéroport de Paris-Orly par la DGAC a conduit à 130 annulations de vol pour la seule fin de journée du 18 mai. Face aux désagréments qu’ils ont subis, les passagers ne sont pas sans solution.
Le règlement européen n° 261/2004 du 11 février 2004 confère en effet aux passagers concernés un droit au remboursement ou au réacheminement, de même qu’un droit à une prise en charge. Concrètement, cela signifie que les passagers ayant vu leur vol annulé ont d’abord le choix d’obtenir le remboursement de ce vol (dans un délai de 7 jours) ou de demander à être réacheminés vers leur destination finale dans des conditions de transport comparables, dans les meilleurs délais ou à une date ultérieure, à leur convenance. Précisons ici que, conformément à la jurisprudence récente de la Cour de justice de l’Union européenne venant interpréter le règlement n° 261/2004, le remboursement demandé doit prioritairement être effectué sous la forme d’une somme d’argent et que les bons de voyage (ou « avoirs ») ne peuvent être fournis à ce titre qu’après accord signé du passager.
S’agissant ensuite de la prise en charge, les passagers se voient offrir, gratuitement, un certain nombre de prestations (rafraîchissements, possibilité de passer deux appels téléphoniques ou d’envoyer deux messages), ainsi que, dans le cas d’un réacheminement prévu au moins le jour suivant, un hébergement à l’hôtel.
Il convient encore de noter que les personnes à mobilité réduite (et celles qui les accompagnent), de même que les enfants non accompagnés, doivent faire l’objet, en pareil cas, d’une vigilance particulière de la part des compagnies aériennes.
Une indemnisation forfaitaire doit-elle être versée aux passagers ayant vu leur vol annulé ?
Le règlement européen du 11 février 2004 est très clair sur ce point : en complément des solutions évoquées ci-dessus, les passagers ayant vu leur vol subitement annulé ont droit à une indemnité forfaitaire de la part du transporteur aérien effectif, dont le montant varie en fonction de la distance que devait parcourir leur vol. Toutefois, cette indemnité n’est due qu’en l’absence de « circonstances extraordinaires » qui n’auraient pas pu être évitées même si toutes les mesures raisonnables avaient été prises.
Au vu des faits survenus à Paris-Orly les 18 et 19 mai derniers, il n’est pas douteux que la panne de radar qui a touché la tour de contrôle aérien de Paris-Orly et conduit la DGAC à réguler le trafic aérien initialement prévu dans cet aéroport est constitutive d’une « circonstance extraordinaire » au sens du règlement européen. Partant, les passagers ayant vu leur vol annulé ne peuvent prétendre à cette indemnisation. Il convient en outre d’observer que, dans ce cas de figure, les transporteurs aériens ont tout autant « subi » ces annulations de vol, imposées par la DGAC. C’est ici l’occasion de rappeler que la sécurité aérienne ne se marchande pas.
Que faire en cas de prestations déjà réservées ou payées au lieu de la destination finale ?
Parmi les passagers ayant vu leur vol annulé, certains se rendaient peut-être sur un lieu de vacances et ont pu réserver ou payer à l’avance des prestations en vue de leur séjour sur place. En pratique, cela concerne souvent des réservations de chambres d’hôtel, des locations de voiture ou des activités sportives ou touristiques.
En pareil cas, il convient de distinguer selon que le vol était « sec », c’est-à-dire sans prestation liée, ou s’il était la partie d’un ensemble que l’on qualifie de « voyage à forfait ».
Dans le premier cas de figure, le transporteur n’est pas tenu d’indemniser les conséquences de l’annulation du vol sur les prestations liées (location de voiture, etc.). Dans le second cas de figure, le transporteur peut être tenu de rembourser au passager le prix du billet, mais tout dépendra en pratique du point de savoir si la situation du passager entre dans le champ d’application de la directive européenne (UE) 2015/2302 du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, directive qui prévoit également un droit au remboursement. Dans l’affirmative, ce droit au remboursement – dont l’exercice, en France, est prévu par les dispositions de l’article L. 211-14 du code du tourisme – supplantera celui prévu par le règlement européen du 11 février 2004.
Confrontés à cet entremêlement des sources, française et européenne, les passagers seront donc avisés, à tout le moins à l’avenir, de ne jamais négliger la souscription d’assurances annulation, de même que de consulter à profit le site Internet du Centre européen des consommateurs, dont l’onglet « Tourisme et Transports » donne accès à de nombreuses rubriques pratiques.