Contrôle d’identité « au faciès » : la CEDH condamne la France
Jeudi 26 juin, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a condamné la France au versement de 3 000 euros à un individu, en raison du dommage moral subi par ce dernier, victime de contrôles d’identité jugés discriminatoires.
L’affaire portée devant la CEDH concerne six individus, d’origine africaine ou nord-africaine, ayant fait l’objet de contrôles d’identité entre 2011 et 2012. Ces derniers considèrent ces contrôles comme du profilage racial, également appelé « contrôle au faciès ».
Le 2 mars 2012, les six requérants ont adressé un courrier au ministre de l’Intérieur pour obtenir les motifs des contrôles dont ils ont fait l’objet. Bien que le ministère ait apporté une réponse, aucune suite concrète n’a été donnée à leur demande.
Les requérants ont alors assigné l’agent judiciaire de l’État ainsi que le ministre de l’Intérieur devant le Tribunal de grande instance (TGI) de Paris, afin de faire reconnaître la responsabilité de l’État pour dysfonctionnement du service public de la justice, sur le fondement de l’article L. 141-1 du Code de l’organisation judiciaire, en raison de contrôles d’identité qu’ils estiment discriminatoires. Par six jugements rendus le 2 octobre 2013, le TGI de Paris a débouté les requérants.
Après avoir épuisé les voies de recours internes, les requérants ont saisi la Cour européenne des droits de l’homme le 9 mai 2017 en invoquant les articles 8 (droit au respect de la vie privée) et 14 (interdiction de la discrimination) de la Convention européenne des droits de l’homme.
Pour cinq des six requérants, la Cour a estimé que les contrôles reposaient chacun « sur au moins une base légale identifiée », et qu’« aucun commencement de preuve individualisée d’un traitement différencié » n’avait été apporté. Elle a jugé qu’aucun « faisceau d’indices suffisamment graves, précis et concordants » ne permettait de faire naître une présomption de discrimination. Elle conclut donc à la non-violation des articles 14 et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.
En revanche, pour le sixième requérant, qui a fait l’objet de trois contrôles d’identité en dix jours, « la Cour considère que l’ensemble des circonstances entourant ces contrôles, dont l’un a été réalisé en dehors de toute base légale, combinées entre elles et avec les rapports et données statistiques officiels, constituent un faisceau d’indices graves, précis et concordants de nature à créer une présomption de discrimination ». Elle constate, en conséquence, une violation de l’article 14, combiné à l’article 8, de la Convention européenne des droits de l’homme.
Retrouvez l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme ici.