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La société par action simplifiée face à son destin

Nulle autre forme sociale n’est aussi proche, dans son essence, de l’entreprise que la société par action simplifiée (SAS), tant elle a été pensée par les entreprises et pour les entreprises.

Peu nombreuses jusqu’en 2008, les sociétés par action simplifiée (SAS) représentent désormais 61 % des  créations de sociétés . Si la SAS regroupe un nombre important de petites structures, les ETI et les grandes entreprises sont présentes dans des proportions nettement supérieures à celles de la société anonyme. Parmi le millier des sociétés commerciales ayant plus de 1.000 salariés, 56 % sont des SAS (3 sur 10 unipersonnelles). Quant aux 58 SAS de plus de 5.000 salariés, toutes sont des filiales.

Vers une formulation plus libérale

Ce constat oblige à la prudence dans la présentation de propositions de réforme pour conserver à cette forme sociale – que nous envient nombre de pays étrangers – sa souplesse et son efficacité managériale. Cette prudence a guidé les travaux du  Haut comité juridique de la Place financière de Paris (HCJP) s’interrogeant sur 25 ans de pratique de la SAS. Tout d’abord, il s’est efforcé de clarifier les règles relatives à la direction qui traitaient de la matière dans un certain désordre depuis la loi du 1er août 2003 qui a introduit les DG et DGD à côté d’un président omnipotent. Il suggère aussi la possibilité d’une co-présidence à laquelle les ETI familiales apparaissent sensibles.

Ensuite, le HCJP a dû s’interroger sur la loi du 19 juillet 2019 supprimant la règle de l’unanimité pour adopter ou modifier la clause d’exclusion (art. L. 227-16 C. com.). S’il estime que cette évolution aurait mérité d’être plus encadrée au regard de notre tradition juridique, il a cependant considéré qu’il était probablement difficile de revenir sur une réforme aussi récente. En tout état de cause, il n’est pas souhaitable que cette modification soit étendue au cas d’exclusion particulier lié au changement de contrôle d’une personne morale associée de la SAS (art. L. 227-17 C. com.). Ce dispositif pourrait profiter tout de même d’une formulation plus libérale – majorité fixée par les statuts incluant au moins l’unanimité des associés concernés – qui pourrait utilement servir de modèle si le législateur décidait de revenir sur le nouvel article L. 227-16. Cette formule mériterait également de prévaloir pour la clause d’inaliénabilité.

Prendre en compte les volontés des associés

Par ailleurs, en cas de transformation en SAS, la difficulté souvent rencontrée de réunir tous les associés a conduit à proposer un assouplissement relatif des conditions d’approbation de 100 à 95 %.

Enfin, le HCJP n’a pas suivi la suggestion récurrente d’une partie de la pratique, de l’application du droit de la SA à titre supplétif qui signerait la banalisation de la SAS. Il a préféré y répondre au cas par cas, pour le refus d’agrément notamment. Cela reste cohérent avec le principe fondateur de la SAS selon lequel l’organisation sociétaire procède essentiellement des statuts. Or, cette conception est perturbée par la règle de droit commun (art. L. 235-1 C. com.) qui ne sanctionne de nullité que la violation de dispositions légales, impératives ou expresses.

La SAS construite sur les volontés particulières des associés perdrait alors tout sens si celles-ci restaient lettre morte. Dès lors, le HCJP préconise une nullité judiciaire facultative prescrite en un an en cas de violation des statuts : une révolution de notre approche de la nullité en droit des sociétés. Mais la SAS n’est-elle pas une révolution en soi ?

Cette chronique est proposée par Anne Outin-Adam, directrice des politiques juridiques et économiques de la CCI Paris Île-de-France, experte du Club des juristes et Michel Germain, professeur émérite, université Paris II Panthéon Assas, coprésidents du groupe de travail du HCJP sur la SAS.

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