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NFT, par Jean-Guy de Ruffray et Etienne Nicolet, avocats à la Cour – Advant Altana, partenaire du Club des juristes

La propriété intellectuelle à l’épreuve des NFTs

L’ampleur et l’impact des Non Fungible Tokens, ou « NFTs », se renforcent indéniablement. Comme souvent en matière d’innovation technologique, le cadre légal requiert des adaptations ou évolutions pour répondre aux problématiques juridiques, notamment en matière de propriété intellectuelle, soulevées par les NFTs.

A titre liminaire, le NFT ne constitue pas en tant que tel l’œuvre protégée par un droit d’auteur ou l’objet protégé par une marque. Le NFT est en effet un certificat de propriété numérique constitué d’un jeton (« token ») non fongible, qui ne peut pas s’interchanger – par opposition au jeton fongible tel que le Bitcoin – auquel sont associées des métadonnées (ou « sous-jacent ») qui fournissent des informations descriptives sur le jeton (par exemple, une photo ainsi que le nom de la photo et de son auteur et le type de fichier [jpeg, png]). Ce NFT est déployé via un smart contract (un programme informatique qui déclenche de façon automatique certaines actions en cas de survenance d’un ou plusieurs évènements selon une logique [Si] … [ALORS]) dans une blockchain telle qu’Ethereum. Il s’agit d’une technologie garantissant un transfert d’actifs sans recours à un intermédiaire et assurant la traçabilité et la protection du certificat. En pratique, ce sont donc les métadonnées (une photographie, un fichier multimédia, un texte, etc.) qui constituent le bien incorporel du NFT et qui peuvent conférer une valeur, notamment financière, à ce dernier.

Dans ce contexte, des problématiques juridiques liées aux droits de propriété intellectuelle concernant ces métadonnées et aux utilisations qui en sont faites ne cessent d’émerger.

Certaines de ces problématiques sont bien connues des praticiens et devraient être appréhendées sans que le cadre légal actuel ne s’en trouve bouleversé. L’on pense par exemple à la reproduction sans autorisation d’une marque protégée – dans le monde réel et/ou virtuel – sur un objet incorporel, comme dans l’affaire opposant la société Hermès à l’artiste Mason Rothschild à la suite de la mise en vente d’une collection de sacs virtuels « MetaBirkin ». Ou, dans un autre secteur, à la mise en vente de titres musicaux sous forme de NFTs sur la plateforme HitPiece, en l’absence de tout accord préalable des ayants-droits. Ces actes, certes commis au travers d’un nouveau support de communication, ne sont pas moins susceptibles de caractériser des actes « classiques » de contrefaçon et ont vocation, à ce titre, à être soumis aux dispositions existantes du Code de la propriété intellectuelle.

L’essor des NFTs pose néanmoins et notamment la question de la suppression des métadonnées contrefaisantes. En effet, les NFTs sont déployés au sein d’un système blockchain dont la force est précisément de garantir la traçabilité et l’inscription irréversible de chaque transaction effectuée. A contrario, cela signifie donc qu’en principe, le NFT associé à des métadonnées contrefaisantes ne peut être supprimé et peut ainsi continuer à être échangé. A l’instar de ce qui est déjà fait avec les marketplaces traditionnelles et/ou les moteurs de recherche sur Internet, les titulaires de droit ont alors tout intérêt à adresser des takedown notices aux plateformes sur lesquelles des NFTs contrefaisants sont susceptibles d’être mis en vente (OpenSea par exemple) afin de leur enjoindre de retirer et/ou de rendre inaccessibles les annonces litigieuses.

L’explosion des NFTs soulève également la question de la protection conférée aux actifs incorporels (marques, œuvres de l’esprit). Là encore, le sujet n’apparaît pas forcément nouveau mais devra vraisemblablement faire l’objet d’ajustements. En matière de marques, par exemple, les titulaires ont déjà commencé à procéder au dépôt de nouvelles marques dans des classes de produits et services (en classes n°9, 35 et 41 notamment) destinées à couvrir un usage dans les métavers, univers virtuels où l’utilisateur évolue par le biais d’un avatar (par exemple Decentraland, Sandbox ou Horizon Worlds de Meta). En matière de cessions de droits d’auteur, par ailleurs, on pourrait les concevoir comme un nouveau type d’usage (de support ?) à couvrir contractuellement.

Ces exemples ne constituent bien entendu qu’une illustration des multiples problématiques  posées aujourd’hui par les NFTs (existence d’un droit de suite et d’un droit de distribution en cas de revente d’un NFT ; etc.). Ainsi, si l’engouement autour des NFTs s’explique sans doute par le caractère novateur et spéculatif lié à ce nouveau support de communication – et à la couverture médiatique donnée à certaines affaires emblématiques impliquant des titulaires de droit notoires –, un certain nombre de règles de l’arsenal législatif en vigueur leur sont d’ores et déjà applicables, sans préjudice de quelques ajustements et précisions jurisprudentielles.

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