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Homo Artificialis – Plaidoyer pour un humanisme numérique

Réparer l’homme, oui ; l’augmenter, pour quoi faire ?

Si, en matière de connaissance, il est « interdit d’interdire », en matière de manipulation, il peut s’avérer nécessaire de refuser certaines retombées des découvertes issues de nos laboratoires et de nos observations. Guy Vallancien,  chirurgien français est professeur d’urologie à l’Université Paris Descartes, membre de l’Académie nationale de médecine et de  l’Académie nationale de chirurgie.

C’est à ce titre qu’il mène une réflexion éthique et philosophique  sur les dérives de la robotique médicale. Nous ne pouvons pas, dit-il, « rester peinards dans notre champ à brouter de l’herbe verte en voyant passer les trains quand les machines intelligentes croissent en potentialités multiples. S’impose à nous, au contraire, l’ardente obligation de plancher dès maintenant et en toute lucidité, sur l’évaluation des bénéfices et des risques générés par ces nouveaux outils. ». Il ne verse ni dans l’optimisme béat des technoprophètes ni dans  le rejet épidermique de tout ce qui vient de la Silicon Valley. Tout en évitant les aspects juridiques pour lesquels, dit-il,  « ses compétences et son expérience sont nulles » il signe un essai érudit, dont il faut saluer l’effort de vulgarisation et le style détendu, qui plaide pour un nouvel humanisme.

Il se  fait  défenseur d’une arrivée mesurée des machines dans l’espace médical. Il revient sur l’expérience  concrète des robots chirurgicaux, la Chirurgie Nintendo, et  vante les mérites de la « main robotique » qui prolonge celle de l’homme dans une coévolution. Mais « le numérique » concerne l’ensemble de la vie sociale et économique.  Homo Artificialis envahit notre univers de terrien. Le Japonais Hiroshi Ishiguro, de l’université d’Osaka,   a conçu  son propre sosie qui donne des conférences à sa place, le robot humanoïde du laboratoire californien Willow Garage, possède un système d’exploitation open source qui autorise sa programmation à la demande : il fait la cuisine, plie le linge et accomplit des dizaines d’autres tâches jusque-là apanages d’Homo Sapiens. Outre ces humanoïdes et ces objets volants, des chiens dociles, des araignées aux multiples pattes actives ou des serpents ultramobiles font leur entrée dans l’univers dérangeant de la robotique. Les complexes militaro-industriels  financent  de multiples entreprises privées pour la construction de robots soldats et de drones militaires furtifs.

Parallèlement   la recherche sur l’intelligence artificielle progresse elle aussi à grands pas.  Mais contrairement à l’homme, l’empathie numérique  est nulle. L’homme a, inscrit au plus profond  de ses gênes, cette capacité à ressentir pour les autres. Ainsi pour l’auteur, il n’existera pas de « machine qui  puisse, un jour, imiter (l’encéphale) dans sa capacité à déroger par exemple aux lois de la cité qui lui sont imposées, tel Antigone face à Créon »  ni d’ailleurs de machine capable de réaliser le propre de l’homme comme, par exemple, l’art musical et son expression naturelle la danse,  ou la cérémonie  du  thé (ou Chad No Yu) telle que les japonais la pratiquent. Le nouvel humanisme  que nous propose Guy Vallancien s’articule autour de « l’objet numérique à l’intelligence supérieure ».  Homo Artificialis doit rester adapté à nos besoins.

Dans le domaine médical, le corps humain n’est pas un « garage à sensations » mais bien une entité sensible qu’on ne saurait imiter. Il faut partager les informations afin de décider des enjeux  qui concernent notre avenir commun, participer  activement et sans état d’âme au développement de l’intelligence artificielle et à la construction des robots,  soulager et réparer ceux  qui subissent maladies, traumatismes  physiques, psychiques et sociaux innombrables, refuser  catégoriquement les dérives qui tendraient à augmenter l’homme au seul bénéfice d’un surcroit de puissance et de longévité et enfin promouvoir l’éducation nécessaire pour être en capacité de décider au-delà des seules opinions fluctuantes et irrationnelles.

« Bienvenue aux robots, bienvenue à Homo Artificialis afin qu’ils agissent au service de l’homme sans le contraindre : auxilium non dominus. Alors viendra le moment de nous rassembler pour chanter et danser, tapant dans nos mains en cadence autour d’un grand feu de bois sous les étoiles. »

 

Homo Artificialis – Plaidoyer pour un humanisme numérique – Guy Vallancien- Editions Michalon – Janvier 2017

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