Compte tenu de l’impressionnant développement de l’arbitrage ces dernières décennies, il n’est guère surprenant d’observer une augmentation du nombre d’affaires dans lesquelles la responsabilité des arbitres est mise en cause. Il est probable que cette tendance se confirme dans les prochaines années. À ce jour pourtant, le régime de la responsabilité des arbitres comporte toujours une large part de mystère. Or, si « tant vaut l’arbitre tant vaut l’arbitrage », il semble nécessaire que les parties puissent savoir dans quelle mesure elles peuvent engager la responsabilité des arbitres lorsqu’elles sont insatisfaites de l’arbitrage. De même, les arbitres doivent également être informés des risques auxquels ils s’exposent s’ils n’exécutent pas leur mission. De récentes affaires ont au demeurant révélé l’importance des enjeux : pour ne citer qu’un exemple, par un arrêt du 31 mars 2015, la cour d’appel de Paris a condamné des arbitres qui avaient rendu leur sentence hors délai, à la restitution de plus d’un million d’euros d’honoraire.
Dans ces circonstances, le Club des juristes a décidé de constituer une commission afin de participer au débat suscité par la responsabilité des arbitres.
En réalité, si cette question peine à trouver une réponse consensuelle, c’est d’abord parce que le principe même de la responsabilité des arbitres est sujet à discussion. On peut estimer que l’arbitre devrait à l’image du juge bénéficier d’une immunité pour accomplir sa mission juridictionnelle. Il ne serait assurément pas sain qu’il puisse voir sa responsabilité engagée en cas de « mal jugé ». Doit-il bénéficier d’une immunité absolue, la sentence seule pouvant être attaquée ? Ne serait-ce pas oublier que l’arbitre, en tant que prestataire de service, doit répondre de la qualité du service fourni. On ne voit pas a priori pourquoi l’arbitre qui refuserait de rendre une sentence, ou qui aurait manqué de façon volontaire à son devoir d’impartialité, mériterait une protection absolue ? Face à ces considérations concurrentes, les droits nationaux semblent faire des choix très différents. Entre l’immunité absolue prêchée par certains et la responsabilité de droit commun défendue par d’autres, la recherche d’une ligne directrice s’avère bien délicate, comme en témoigne la disparité du droit comparé.
L’objectif de la commission sera alors d’éclairer le droit positif de la responsabilité des arbitres en France avant de déterminer, au regard notamment des choix opérés par les droits étrangers, si le régime actuellement proposé ne devrait pas être précisé ou modifié.
Composition de la Commission :
Président : Jean-Yves Garaud Cleary Gottlieb Steen & Hamilton, Associé.
Membres :
Jean-Pierre Ancel, Président de chambre honoraire, Cour de cassation
Grégoire Bertrou, Associé, Skadden, Arps, Slate, Meagher & Flom,
Sébastien Besson, Associé, Lévy Kaufmann-Kohler,
Thomas Clay, Professeur, Université de Versailles St-Quentin en Yvelines,
Alexis Foucard, Avocat, Quinn Emanuel Urquhart & Sullivan LLP,
Jacob Grierson, Associé, McDermott Will & Emery,
Emmanuel Jeuland, Professeur, Université de Paris 1 Panthéon Sorbonne,
Emmanuel Jolivet, Conseiller général de la Chambre de commerce internationale et de la Cour international d’arbitrage,
Georges Jourde, Associé, Veil Jourde,
Elie Kleiman, Associé, Freshfields Bruckhaus Deringer,
Fernando Mantilla-Serrano, Partner, Latham & Watkins LLP,
Didier Rebut, Professeur, Université de Paris 2 Panthéon-Assas.
Secrétaire de Commission : Basile Zajdela, Docteur en droit.