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Trading à haute fréquence, la prohibition de la rente technologique

Derrière la complexité des analyses développées par l’AMF dans sa décision du 4 décembre dernier pour critiquer l’algorithme de trading haute fréquence qui a valu une sanction de 5 millions d’euros à son promoteur, la société Virtu, mais aussi à Euronext, qui n’a mis aucun obstacle à son fonctionnement, c’est sur un raisonnement simple que repose la limite imposée à cette activité.

Le trading à haute fréquence repose sur le cumul de deux avantages.
L’avantage scientifique : c’est le génie des mathématiques mis en œuvre pour multiplier les ordres générés par des algorithmes. Ces modèles sont capables, de manière totalement autonome d’un choix humain, de décider d’acheter, de vendre, mais aussi de renoncer, c’est-à-dire d’annuler des ordres en fonction des circonstances de marché, et ceci à l’intérieur d’un intervalle de temps compris dans une fraction de seconde.
L’avantage technologique : pour générer cette activité de marché de la nano seconde, les systèmes informatiques doivent être très performants et d’une puissance sans égal, mais aussi les plus proches possibles de l’entreprise de marché pour raccourcir les délais de transmission.

Mathématiques et informatique cumulés permettent à un intervenant d’opérer sur le marché dans des conditions telles, que lorsque les autres intervenants sont informés de l’insertion d’un ordre, celui-ci n’existe déjà plus, car il a été exécuté ou retiré. La transparence du marché est donc annihilée par la quantité des ordres générés par l’algorithme et l’instantanéité du sort qu’il leur est fait non pas par le marché seul, mais par l’algorithme lui-même qui agit ainsi en secret en s’ajustant en permanence.

En droit économique la limitation de la puissance et de la rapidité est au cœur de nombreuses règles pour assurer une égalité que la compétition vise tout au contraire à dépasser.
La décision de l’AMF qui limite les facultés de trading à haute fréquence s’apparente ainsi par bien des aspects à la jurisprudence en matière de droit de la concurrence sur l’abus de position dominante. Le marché ne peut pas s’accommoder d’acteurs aussi puissants qu’ils peuvent exercer une influence déterminante sur la formation des prix.
Autre exemple, le droit de la faillite qui vise à éviter que les débiteurs ne soient traités « au prix de la course », c’est-à-dire que la priorité dans le règlement du passif aille au plus rapide.

L’arbitrage des marchés financiers au nom de l’amélioration de leur liquidité souvent avancée comme justifiant le trading à haute fréquence ne fait donc pas exception au droit commun qui ne permet en aucun cas de transformer un avantage, de quelque nature qu’il soit, en une rente. C’est certainement la seule chose à retenir de la position de l’AMF dans sa lutte contre le trading à haute fréquence : la rente technologique est prohibée.

Frédéric Peltier

Frédéric Peltier

Avocat à la Cour, Peltier Juvigny Marpeau & Associés
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